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RÉDACTION #1 : L'ÉCRITURE ENGAGÉE

 

 

RÉDACTION #1 : L'ÉCRITURE ENGAGÉEQui ne s'est jamais confronté à l'écriture des barricades, à la révolte des humains ? Au combat de la différence dans l'intolérance et aux cris de rage et de désespoir des condamnés à mort ? Victor Hugo [1], Voltaire, Emile Zola [2], Jean-Paul Sartre, Primo Levi [3], Simone de Beauvoir [4] ; autant d'auteur·ice·s qui ont écrit leurs temps secoués de débats en faisant de leur plume une arme de l'engagement. Autant de manières de voir le monde et d'en dénoncer les dérives, de prendre part aux combats en penchant de ce côté-ci ou de ce côté-là de la balance. Autant de choses à dire. Oui, mais comment les dire ? Parce que comme le considère si bien Annie Ernaux [5], écrire n'est pas une activité hors du monde social.

 

 

I – DONNER SON CORPS ET SON ESPRIT                                                               

 

 

RÉDACTION #1 : L'ÉCRITURE ENGAGÉEParler de l'engagement dans l'écriture sans évoquer Sartre serait comme oublier de mettre du lait dans la pâte à crêpes. Sartre est LE théoricien, dit-on, de la littérature engagée. Ses réflexions sur l'art de maîtriser les mots le poussent à s'interroger sur le sens profond de l'acte d'écrire. C'est ainsi que, dans son essai « Qu'est-ce que la littérature », publié en 1948, l'écriture se révèle au service d'une cause, d'une finalité politique, éthique. Une instrumentalisation pour ainsi dire. Écrire, c'est révéler et confronter : révéler le monde, la société, faire en sorte que personne ne puisse ignorer. Cette mise en lumière faite, le monde, la société sont devant un choix impératif : s'assumer ou changer. C'est en effet en dévoilant au travers des mots que l'auteur·ice s'engage, entre dans le mouvement et l'action. Car révéler, c'est nommer et nommer, c'est montrer. Montrer, c'est pouvoir changer. « Si vous nommez la conduite d'un individu, par exemple, écrit-il,  vous la lui révélez : il se voit et il se met à exister ».

RÉDACTION #1 : L'ÉCRITURE ENGAGÉEPour Sartre, se vouloir engagé·e c'est avant tout se consacrer à la situation sociale, économique et politique ; à la condition humaine au sens large tout en se positionnant au centre des événements de son époque. « La littérature efficace, c'est la littérature qui entraîne l'homme vers l'amélioration de la condition des hommes et vers l'humanité ». Qu'iel le veuille ou non, celui ou celle qui écrit doit faire face à la réalité qui s'impose à iel et l'accompagne, en témoigner et l'inscrire dans son ½uvre par des revendications fortes et explicites. Parce qu'écrire est un acte. Un acte pour lequel l'auteur·ice est pleinement responsable et qu'iel se doit d'assumer. L'auteur·ice en est ainsi, pourrait-on dire, déterminé : iel s'adresse à tel public et utilise tel langage. En ce sens, le style et la dimension esthétique ne doivent être qu'un second plan, un appui qui sert le fond et la revendication générale.

RÉDACTION #1 : L'ÉCRITURE ENGAGÉEMais si Sartre est considéré comme le maître de l'engagement, il faut aussi savoir démystifier sa vision des choses. L'engagement s'étale le long d'un large spectre avec des degrés différents ; il n'est pas uniquement restreint à l'usage des mots dans la direction d'une cause ou d'un combat.  Il ne signifie pas non plus prendre position de manière tranchée par rapport à des questions sociétales, politiques ou économiques. Certain·e·s diront même que le simple fait de produire une ½uvre littéraire, parce qu'elle traduit la vision du monde qu'à son auteur·ice et lui donne du sens, est une forme d'engagement. D'autres, que les thématiques dites « sociales » abordées dans tel roman le classent dans la catégorie « Littérature de l'engagement », et non « Littérature engagée », laquelle ne couvrirait que la période d'après-guerre. La « Littérature de l'engagement » viserait, elle, essentiellement à provoquer des controverses religieuses, des débats sociaux ou politiques et à dévoiler une certaine forme « d'art social » au sein du récit.

RÉDACTION #1 : L'ÉCRITURE ENGAGÉEMais quoi qu'il en soit, en définitive, l'engagement demeure personnel. Il est d'abord tourné vers soi avant d'être tourné vers un quelconque lectorat. L'écriture engage le corps et l'esprit. L'imagination, la mémoire et les mots. Elle est un choix. L'engagement est le rapport qui lie finalement l'auteur·ice à son ½uvre. Il s'engage pour son récit, pour ses héros et avec eux. Il devient alors très important de considérer sa propre relation à l'écriture, d'en comprendre les raisons et les enjeux pour comprendre en quel sens elle nous engage. Qu'est-ce qu'écrire ? Pour quoi / pourquoi écrivez-vous ? Qu'avez-vous à dire ?  

 

 

II – L'ILLUSION DU RÉEL                                                                                              

 

 

RÉDACTION #1 : L'ÉCRITURE ENGAGÉEEn partant du postulat sartrien selon lequel la littérature doit participer à la prise de conscience des humains quant à leur situation sociale ou politique et les mener à assumer leur liberté, comment écrire son temps ?

RÉDACTION #1 : L'ÉCRITURE ENGAGÉEPuisque la littérature engagée est une littérature sociale qui a pour principale visée de « rejoindre » les humains et de les ouvrir à de nouvelles visions du monde, le meilleur moyen de s'engager est encore de dépeindre le réel avec la force du détail. « Décharner la réalité pour la faire voir », pour reprendre les termes d'Annie Ernaux. Il s'agit alors de rendre compte de cette réalité qui fait loi dans nos sociétés, ses imperfections autant que ce qu'elle peut avoir de beau, en comprenant bien que rien n'est complètement blanc ou noir, mais au contraire plein de nuances de gris. Ce n'est pas juste écrire une histoire où les humains seraient parfaits, conformes à ce que l'on attendrait d'eux selon des lignes de conduite présupposées. Ce n'est pas juste imaginer un environnement rose, dénué de conflits. C'est au contraire balayer au sens large la multiplicité qui compose notre temps : choisir de montrer la société dans son entièreté. S'attarder sur la vie et s'intéresser aux contrastes, à la différence des perceptions. Pointer avec les mots ce que les autres oublient de dépeindre : parce que la réalité sociale comprend la mixité et la multiculturalité, les classes sociales / culturelles / politiques et leur considération au quotidien, le handicap, les différentes sexualités, la place de la femme, de l'environnement, des animaux, la place de l'empathie, de la tolérance, l'indifférence, les supposés attendus physiques, les discriminations, leur dénonciation, les combats associatifs, la guerre, les conflits familiaux... Composer avec les différences qui existent au quotidien entre les gens et les retranscrire dans son récit, c'est déjà s'engager en faisant le choix de représenter l'altérité. C'est donner l'illusion du réel et aiguiser la sensibilité des hommes, leur permettre de se confronter à leurs manquements. Parce que, soyons honnêtes, que nous dit une histoire où les héros et héroïnes sont tous blancs, grands, parfaitement sculptés physiquement parlant, les cheveux soyeux et le regard de braise, où tout va pour le mieux tant sur le plan professionnel que familial en dépit de quelques petites aventures ; bref, l'image même du  personnage stéréotypé qui évolue dans un monde sans problème ? Difficile de s'y retrouver...
 
RÉDACTION #1 : L'ÉCRITURE ENGAGÉEAlors comme ça l'illusion du réel serait l'apanage du réalisme ? Non, pas uniquement. Le fantastique peut être un puissant vecteur de l'engagement, lui aussi. Lorsqu'il recrée une société, qu'il lui donne des codes particuliers, il peut être amené à dénoncer ou améliorer une situation donnée. Le meilleur exemple est encore Harry Potter. Qui, en ayant lu les livres, en ayant visionné les films, n'a pas su y croire ? Harry Potter représente la construction d'un monde tangible, d'un univers fantastique qui s'inspire des lois du réel. C'est l'histoire d'une guerre, où se confondent les différences, les divergences entre croyances, où coexistent les classes sociales et les institutions de pouvoir (avouez, c'est quand même fort, l'idée du Ministère de la Magie !). C'est l'évolution de personnages dans un environnement où s'incarne la diversité, où tout n'est pas parfait. Où certains apparaissent ambivalents, d'autres discriminants, d'autres encore reproduisent les schémas parentaux et répètent ce qu'on leur a inculqué (tenez, Drago, par exemple). Et Rowling le dit elle-même : « Je voulais qu'Harry quitte le monde des Moldus et retrouve exactement les mêmes problèmes dans l'univers des sorciers. On y retrouve donc cette volonté d'imposer une hiérarchie, accentuée par les notions de fanatisme et de pureté de la race, qui sont de graves erreurs mais qui se manifestent dans le monde entier. Les gens aiment se croire supérieurs et s'enorgueillissent d'une pureté apparente, à défaut d'autre chose. Donc oui il y a bien un parallèle [avec le nazisme], mais pas avec lui seul. Je pense qu'on peut voir dans le ministère de la Magie, même avant la prise de possession de ce dernier, un lien avec un ou des régime(s) que nous connaissons et aimons tous. »
 
RÉDACTION #1 : L'ÉCRITURE ENGAGÉEC'est toute la force de son univers. Il est crédible parce qu'il prend appui sur ce que nous connaissons tout en bâtissant quelque chose de nouveau. Rowling nous parle d'une société, de luttes et de pouvoir. Prenez Hermione par exemple, qui se donne corps et âme dans le combat contre l'oppression des Elfes et qui emploie les méthodes que nous connaissons (slogans, distribution de badges...) ou Dolores Ombrage qui débarque à Poudlard pour retourner tout le système éducatif. Rowling dénonce implicitement des faits particuliers, pose des questions qui concernent nos sociétés actuelles, file des métaphores, dépeint des situations qui ne sont pas sans rappeler celles qui font notre présent. Par exemple, dit-elle, « J'ai voulu bien consciemment montrer ce qu'est l'un des grands fléaux de la guerre : le massacre de personnes tout à fait innocentes. Un autre grand désastre provoqué par la guerre, c'est que des enfants perdent leurs familles » ; qui ne penserait pas à la Syrie ? À travers Poudlard, Rowling nous enseigne la tolérance et l'altérité : car son école est mixte, laïque, multiculturelle et multiraciale (sang-pur, sang-mêlé, né-Moldu pour la métaphore dans le monde sorcier).

RÉDACTION #1 : L'ÉCRITURE ENGAGÉEEn somme, Harry Potter est universel dans ce que son récit a à nous dire, dans ce qu'il retranscrit.

 

 

III – TITILLER LA SENSIBILITÉ                                                                                  

 

 

RÉDACTION #1 : L'ÉCRITURE ENGAGÉEQu'est-ce qui fait que le message peut être perçu par læ lecteur·ice ? Les thèses sont nombreuses à ce propos, mais quoi qu'il advienne, c'est bien en s'adressant au ressenti de son lectorat qu'un·e auteur·ice peut le toucher et lui faire entendre ce qu'iel souhaite lui dire. Autrement dit, pour être percutant, mieux vaut faire appel à sa sensibilité et ses émotions. L'aider à s'intégrer à votre monde et lui permettre une proximité avec vos personnages.

RÉDACTION #1 : L'ÉCRITURE ENGAGÉELe but n'est pas de confronter læ lecteur·ice, de chercher son adhésion à tout prix et de lui dire à travers votre récit que vous avez raison et que lui a tort. Il ne faut jamais oublier que votre message sera perçu de différentes façons selon les personnalités auxquelles vous vous adressez. Chaque lecteur·ice voit avec ses propres lunettes, sa propre vision. À ce titre, il peut être parfois trop brutal de le confronter directement à votre message, cela risque de jouer en votre défaveur avec les esprits les plus récalcitrants. Ce serait un peu comme construire un mur avec votre annonce placardée juste sous son nez alors qu'iel avance tranquillement sur le chemin de sa lecture. Il y a de quoi briser les ardeurs, n'est-ce pas ? Néanmoins, cela peut aussi fonctionner de procéder ainsi. Le plus dur est en fait de trouver un juste milieu entre le « dire explicitement » et le « dire implicitement » qui, a contrario, risque de faire disparaître le message en le rendant illisible et inaudible par le lectorat parce que trop dissimulé. Tenez par exemple, pour continuer avec Harry Potter ; J.K Rowling n'a jamais ouvertement écrit dans ses romans que Dumbledore était homosexuel. Elle y a glissé des sous-entendus quant à une relation très forte et fusionnelle avec un autre sorcier. Ce n'est que lors d'une conférence, en 2007 soit juste après la sortie du septième tome qu'elle a révélé avoir « toujours pensé que Dumbledore était homosexuel ». Ce qui a enfin clos les spéculations et mis un point final au débat. S'il y avait débat, c'est que les lecteur·ice·s n'ont pas perçu d'une façon unanime ce que Rowling sous-entendait. C'est que certain·e·s croyaient à l'homosexualité de Dumbledore, d'autre pas et ces derniers ont alors été surpris de l'apprendre. On peut toujours questionner la volonté de percevoir le message, bien entendu... Dans ce cas précis, quelqu'un s'est levé et a quitté la conférence à la suite de la révélation. Cela veut dire beaucoup, non ?
 
RÉDACTION #1 : L'ÉCRITURE ENGAGÉEEn ne révélant pas explicitement l'homosexualité de Dumbledore dans le récit, mais en le laissant entendre d'une certaine façon (plus ou moins perceptible, comprenez), Rowling a aussi évité l'écueil de poser une étiquette sur ce personnage emblématique de sa série. Les étiquettes vont souvent de paire avec un effet stigmatisant (voir Erving Goffman à ce sujet [6]). C'est-à-dire qu'elles se concentrent sur un aspect de la personne en omettant tous les autres, en faisant un « résumé » (si tant est qu'on puisse « résumer » quelqu'un...) sommaire. Dumbledore n'est pas seulement gay, il est encore animé d'une grande sagesse, représente une figure paternelle et possède une lourde histoire familiale (la liste est longue). En choisissant de traiter de tel ou tel sujet qui raccrocherait un personnage à une « minorité », faites attention à ne pas le dépeindre que sous un seul côté du spectre. Il doit être avant tout un ensemble cohérent dans sa construction. Le message n'en sera que plus fort. Pour prendre une image, il s'agirait par exemple que tous ses atomes soient liés entre eux, et non qu'un seul se détache des autres et ne devienne ce qui le définisse.  

 

 

IV – CONCLUSION                                                                                                             

 

 

RÉDACTION #1 : L'ÉCRITURE ENGAGÉEVous l'aurez compris, écrire en se voulant engagé·e, ce n'est pas de la tarte. C'est avant tout se donner corps et âme à son récit, s'engager pour ses personnages et leur histoire, mais encore pour soi-même dans un projet pour le moins extraordinaire. C'est encore vouloir dénoncer des travers, donner de l'espoir en forgeant une réalité parallèle à la nôtre qui fonctionnerait presque comme une illusion. Un monde, précisément, auquel læ lecteur·ice est indubitablement capable de se raccrocher et des personnages solides qui lui ressemblent dans leur humanisme. Sans oublier bien entendu de retenir ses émotions et de jouer avec sa sensibilité. Car une histoire qui touche est une histoire qui marque la mémoire et change la focale. Il est des romans qui ont changé la vie de leurs lecteur·ice·s, qui leur ont ouvert les yeux. Le tout, c'est de savoir le faire avec humilité. Et n'oubliez pas : « On n'est pas écrivain pour avoir choisi de dire certaines choses mais pour avoir choisi de les dire d'une certaine façon », comme disait Jean-Paul Sartre.  

 

 

V – RESSOURCES ET ARTICLES CONNEXES                                                         

 

 

➳ Le compte-rendu de notre table ronde virtuelle #15 dédiée à l'écriture engagée
➳ Olivier NEVEUX, « LITTÉRATURE ENGAGÉE », Encyclopædia Universalis
➳ D'Encre et de Couleurs propose des articles très intéressants sur divers sujets notamment les maladies mentales, les phobies, les handicaps, les dépendances, etc.

 


[1] Voir Claude Gueux, par exemple, où Victor Hugo prend position sur la peine de mort.
[2]  Dans Germinal, Zola dépeint les conditions de vie épouvantables des ouvriers de la mine.
[3]  Si c'est un homme, le vécu de Primo Levi en camp de concentration.
[4] Pour son engagement littéraire dans la cause du féminisme.
[5] Considérée comme transfuge de classe (issue d'un milieu paysan, elle est devenue femme de lettres et professeure de lettres), elle écrit notamment son avortement, la maladie d'Alzheimer de sa mère ou son cancer du sein. Elle déclare à propos de l'écriture qu'elle est le « désir de bouleverser les hiérarchies littéraires et sociales en écrivant de manière identique sur des objets considérés comme indignes de la littérature, par exemple les supermarchés, le RER, et sur d'autres, plus nobles, comme les mécanismes de la mémoire, la sensation du temps, etc., en les associant »
[6] Stigmates. Les usages sociaux des handicaps ; selon ses termes, un individu stigmatisé  « se définit comme n'étant en rien différent d'un quelconque être humain, alors même qu'il se conçoit (et que les autres le définissent) comme quelqu'un à part. », ce, comme résultante du regard d'autrui sur les attributs de son identité considérés comme étant en décalage par rapport aux attentes normatives. Celui qui porte un stigmate est discrédité alors même que l'attribut qui stigmatise n'est pas en lui-même porteur de discrédit. On pourrait même dire que le stigmate n'existe pas et qu'il ne trouve d'existence que dans la valeur qu'on lui donne, à travers le regard et les définitions d'autrui.

 

 

RÉDACTION #1 : L'ÉCRITURE ENGAGÉE
Tags : Améliorer sa plume, Rédaction, Clow
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#Posté le mercredi 04 avril 2018 00:00

Modifié le mercredi 03 mars 2021 12:39

RÉDACTION #6 : LE PERFECTIONNISME

 

 

RÉDACTION #6 : LE PERFECTIONNISMEAh ! Vous voilà penché depuis 5 minutes sur un paragraphe dont la tournure vous semble plate. Cela fait déjà dix fois que vous tentez de le réécrire mais chaque fois il déçoit vos espérances. Ça sonne creux, trop faux, trop fade, trop chichi, pas assez d'émotions, pas assez imagé, percutant, poétique ou rythmé. Sans parler de vos petits bonhommes que vous trouvez bien vides... Bref, la balance penche plutôt du côté « c'est nul » et vous n'avez qu'une envie : tout effacer une énième fois ou rouler en boule cette feuille de papier qui en vient à vous agresser l'½il. Vous êtes en plein tourment perfectionniste.
 
RÉDACTION #6 : LE PERFECTIONNISMEPas de demi-mesure, ce chapitre doit être parfait.
 
RÉDACTION #6 : LE PERFECTIONNISMEOui, mais... Qu'est-ce que la perfection ? Et c'est peut-être bien là le problème.
 
Un problème certes complexe, mais dont la solution semble a priori assez simple. Commençons par casser le mythe une bonne fois pour toutes : la perfection n'existe pas (en gros, gras et souligné, sisi). Alors, libérateur ? Pas sûr ? (lisez la suite) On ne cessera jamais de le répéter : le parfait est l'ennemi du bien. Le perfectionnisme ne correspond pas, loin des idées reçues (sortez-vous ça du crâne), à la recherche de l'excellence. Il correspond à la recherche de l'inatteignable et de l'inaccessible. D'où sa propension, la plupart du temps, à vous miner le moral. Épuisement, stress, démotivation, perte des priorités (flemme ?), autant de conséquences à mettre la barre trop haute. Allez, pas de fatalisme, non le perfectionnisme n'est pas une prison. Oui vous pouvez vous en échapper. Comprendre ses causes, ses mécanismes, c'est pouvoir repérer les moments de son expression pour mieux le contrer. Ready ?

 

 

I – AUTOPSIE DU PERFECTIONNISME                                                                    

 

 

RÉDACTION #6 : LE PERFECTIONNISMESi le perfectionnisme englobe une multitude de comportements et touche autant à notre identité personnelle par une sans cesse remise en question, qu'à notre confiance en nous et notre façon de construire et de vivre nos relations interpersonnelles, quelques points sont néanmoins facilement identifiables.
 
1. Ne pas commencer un projet, une histoire, un chapitre, avant d'être sûr·e de pouvoir tout écrire « parfaitement »
 
RÉDACTION #6 : LE PERFECTIONNISMELe risque est de créer de la frustration. Ne pas commencer un projet n'empêche cependant pas d'y réfléchir et de laisser les idées fuser et s'accumuler. Votre imagination dans ce cas est souvent la pire traîtresse. C'est passer à côté d'une aventure qui peut se révéler extraordinaire pour vous. Alors vaut-il mieux refuser de s'y atteler au risque de louper quelque chose d'incroyable, juste parce que vous avez peur que ce ne soit pas assez parfait ? Que ce ne soit un « échec » ? « Il n'y a pas de réussite facile ni d'échecs définitifs », écrivait Proust. Prenez-en de la graine et n'ayez pas peur, laissez ce projet naissant s'exprimer. Un projet est avant tout une construction. Une construction qui demande parfois de tâtonner, mais c'est toujours une magnifique aventure.
 
2. Focaliser sur le résultat [devant être « parfait »] et perdre de vue la démarche
 
RÉDACTION #6 : LE PERFECTIONNISMEAutrement dit, voir le livre déjà imprimé, relié, et omettre toute la partie construction de votre histoire, ce qui fait l'intérieur de votre manuscrit. Beaucoup de petites choses comptent et sont nécessaires pour parvenir au résultat final. Ce serait comme imaginer votre future maison, être tellement obnubilé par le résultat, à savoir qu'elle soit construire, que vous oubliez de poser les cloisons à l'intérieur, les portes, la tuyauterie et l'électricité. Aberrant, non ? L'idée est la même : l'écriture d'une histoire, d'un roman est un long processus qui englobe autant le travail en amont de réflexion, de construction de l'intrigue, de vos petits bonhommes, de l'environnement, de l'ambiance que l'écriture en elle-même (mot après mot, phrase après phrase, paragraphe après paragraphe, chapitre après chapitre), et le travail en aval (relecture, correction, retouches). Chaque étape nous enrichit et nous permet d'apprendre, bien plus que le résultat final dénué de tout ce processus. Elles sont de petites victoires, des réussites et des ponts vers l'ensemble.
 
3. Procrastiner : « je le ferai demain » [comprenez : jamais]
 
RÉDACTION #6 : LE PERFECTIONNISMEÉvidemment tous les perfectionnistes ne remettent pas forcément à demain, d'autres au contraire s'activeront jusqu'à l'épuisement, ce qui n'est pas mieux, disons-le. Reste que remettre à demain, c'est repousser de manière indéfinie, car c'est bien connu, demain n'existe pas. Parfois, il faut savoir s'y jeter, peu importe l'appréhension, et c'est d'ailleurs souvent dans ces moments qu'on se rend compte qu'on en était capable. En fin de compte, il s'agit de trouver un équilibre entre trop et pas assez, mais écrire quoi qu'il arrive.
 
4.   Éternel insatisfait
 
RÉDACTION #6 : LE PERFECTIONNISMEDiable, rien dans ce que vous avez écrit n'est satisfaisant ! Rien, vraiment ? Tout est bon à jeter ? Bien sûr que non. Le perfectionniste, en se concentrant sur la « perfection », a en fait un regard biaisé sur ce qu'il fait. Biaisé par l'auto-critique et la sévérité de son jugement envers lui-même. Pourtant, il y a des jolies choses à relever.
 
5.   La peur de la nouveauté
 
RÉDACTION #6 : LE PERFECTIONNISMEVous voilà devant un nouveau projet. Oui, et c'est parce qu'il est nouveau qu'il vous fait peur. Comment le prendre, comment l'aborder ? La nouveauté signifie repartir de zéro, mais elle agit encore comme un révélateur face à soi-même et face aux autres (dans le cas où on publie son histoire). Plus que la peur, la nouveauté est l'occasion d'expérimenter et de découvrir. C'est bien aussi de sortir de sa zone de confort. Prenez-le comme un défi et prouvez-vous à vous-même que vous en êtes capable, car vous l'êtes, en définitive !
 
6.   Se comparer aux autres
 
RÉDACTION #6 : LE PERFECTIONNISMECe vice. Et quoi de plus coriace que de regarder ce que les autres font ! Un peu comme regarder l'assiette de son voisin et s'apercevoir qu'on a moins de petits pois, vous voyez ? Pour le perfectionniste, ce qu'écrivent les autres est un critère important. Leur repère établit la ligne de ce qui est parfait ; bon ou mauvais. Qui ne s'est jamais senti happé par les écrits d'un·e autre auteur·ice ? Qui n'a jamais ri, pleuré sur d'autres romans ? Qui n'a jamais eu l'impression de ne pas atteindre ce « niveau » ? Oui, mais l'écriture n'est pas une compétition : nous avons tous des styles, des ressentis et des manières d'imager, de travailler nos héros qui sont différentes. Deux romans sont en fait incomparables, tant les auteur·ice·s qui les ont écrit sont différents dans ce qu'ils sont et dans ce qu'ils font. Se concentrer sur l'autre, c'est oublier ce qui constitue nos propres forces.
 
7.   Avoir peur de la critique
 
RÉDACTION #6 : LE PERFECTIONNISMENous l'avons déjà vu dans notre article dédié, recevoir une critique n'est évident, et ça l'est peut-être encore moins quand on est aussi tatillon qu'un perfectionniste. Justement parce que ces critiques sont censées soulignées les « imperfections », les « faiblesses » d'un récit ? Oui et non. Souvenez-vous, la critique d'une ½uvre littéraire ou artistique, telle que donnée par sa définition, représente un jugement motivé, le fait de l'examiner en détail ; elle pointe autant les failles, que les forces. Sans oublier qu'une critique est avant tout le reflet du point de vue de son auteur·ice, au moment où iel la rédige. Comprenez : elle ne vaut pas une fois pour toutes ! Elle dépend d'un ressenti à un moment donné, d'une personne donnée et n'a pas vocation à être arrêtée ou universelle. D'autres lecteurs auront un avis bien différent de votre histoire ou de tel et tel passage en particulier. Même si vous portez un amour incommensurable à votre histoire et à vos petits bonhommes, que vous avez peur qu'ils soient touchés directement, remis en question, pas de panique. La critique fait partie de la construction, et si elle manque de tact, le but de son auteur·ice est toujours de vous aider ! Clarifiez avec lui, demandez-lui des précisions.

 

 

II – L'IMPERFECTION CROUSTILLANTE                                                                

 

 

RÉDACTION #6 : LE PERFECTIONNISMEOui, nous l'avons dit haut et fort : la perfection n'existe pas. Si l'idée de perfection est universelle, elle est en fait très subjective. La « perfection » des uns n'est pas celle des autres. Vous pouvez trouver un texte très bien écrit, les personnages vraiment bien travaillés, l'ambiance géniale, le style incroyable, sauf que quelqu'un d'autre pourra le trouver d'un ennui profond. Est-ce pour autant que ce texte est parfait / imparfait ? Non, nous sommes d'accord. À ce titre, donc, rendons aux imperfections leur intérêt, car ce sont bien elles qui font le charme d'une personne autant que d'une histoire ; un roman magnifique n'aurait pas grand intérêt s'il ne portait pas en lui ses petites failles. Quoi de plus joli que des grains de sable dans les rouages ? Une dissonance dans le rythme d'un paragraphe, une image un peu maladroite, une comparaison fébrile ou un personnage qui ne sait pas ce qu'il fait... Les imperfections sont belles et elles ont toutes leur place dans votre histoire. Donnez-vous la permission de ces imperfections. Vous verrez à la relecture globale de votre récit qu'elles y ont toutes leur place et qu'elles apportent un petit plus.

RÉDACTION #6 : LE PERFECTIONNISMEN'oubliez pas non plus que votre façon d'écrire évolue en fonction de votre parcours personnel. Si vous écrivez la même histoire à cinq ans d'intervalle, vous n'aurez pas la même finesse de style ou la même profondeur. C'est normal ; votre ½il et votre sensibilité s'aiguisent de fil en aiguille, de même que vos intérêts changent. Ce que vous trouvez imparfait maintenant pourrait devenir un trait que vous apprécierez dans le futur. Laissez-vous le temps – à vous-même autant qu'à votre récit – de continuer à mûrir.

RÉDACTION #6 : LE PERFECTIONNISMEEnfin, n'oubliez jamais que « c'est en forgeant qu'on devient forgeron ». Les erreurs sont normales, il faut se tromper pour s'améliorer, cela fait partie du processus. Rappelez-vous combien de fois vous êtes tombé·e avant d'apprendre à marcher, et pourtant vous n'aviez pas peur d'essayer !

 

 

III – VAINCRE LE PERFECTIONNISME                                                                    

 

 

RÉDACTION #6 : LE PERFECTIONNISMECela vous semble peut-être compliqué, mais ce n'est pas impossible ! Cela prend certes du temps, mais vous en êtes capable, vous pouvez y parvenir. Allez, quelques petits conseils pour essayer de faire reculer la bête perfectionnisme autant que faire se peut !
 
 
1.   Le plus important : prendre du recul. Si vous sentez que vous bloquez, faites une pause et réfléchissez. Essayez de passer par l'écriture pour décortiquer votre perfectionnisme. Tentez de le décrire, de relater l'expérience que vous en avez ; comment cela vous gêne ? Comment cela vous empêche de consacrer du temps à des projets qui vous tiennent à c½ur ? Comment cette tendance vous est venue ? Si elle a évolué ? Comment vous pourriez la dépasser ? Au mieux vous l'analyserez, au mieux vous serez capable de la comprendre et de la surpasser.
 
2.   Essayez autant que possible d'être indulgent avec vous-même. Lâchez prise, soyez bienveillant envers vous-même et acceptez de prendre le temps qu'il vous faut. Donnez-vous la permission d'être imparfait, comme tout le monde ; acceptez vos imperfections – le fait que tout soit imparfait, plus généralement – et servez-vous-en de manière positive.
 
3.   Ne cherchez pas à être læ meilleur·e (d'ailleurs demandez-vous meilleur·e que quoi ? meilleur que qui ?), faites juste de votre mieux. Cela suffit amplement. Essayez, tout simplement. Cela donne beaucoup plus satisfaction que de se fixer des objectifs inatteignables. Si vous pensez pouvoir faire quelque chose : vous pourrez assurément le faire. En revanche, croire qu'il ne vous est pas possible de le faire compromet vos chances d'y parvenir effectivement. En sommes, soyez optimistes !
 
4.   Écrivez sans pression. Même si aujourd'hui vous n'êtes pas entièrement satisfait, revenez-y demain ou dans deux jours, votre impression peut changer avec le recul.
 
5.   Rappelez-vous pourquoi vous écrivez.
 
6.   Parlez-en à vos ami·e·s auteur·ice·s, n'ayez pas honte. Partagez les passages qui vous causent insatisfactions et recueillez leur avis. Un point de vue extérieur permet de reconsidérer sa subjectivité. Et puis, ça pourra toujours vous remotiver pour la suite si vous rencontrez une baisse de régime !

 

 

IV – CONCLUSION                                                                                                             

 

 

RÉDACTION #6 : LE PERFECTIONNISMESi le perfectionnisme peut avoir ses bons côtés, sans toutefois l'amalgamer avec la rigueur et l'esprit consciencieux, il est le plus souvent bloquant. Plus encore avec la frustration qui en découle. Le comprendre est un premier pas vers son dépassement. J'espère en tout cas que ces petites astuces vous aideront s'il vous entrave de temps en temps. N'hésitez pas à vous exprimer sur le sujet et à partager vos petites stratégies pour faire taire læ perfectionniste qui vit en vous ! En parler, c'est un bon moyen de relativiser !

 

 

V – RESSOURCES ET ARTICLES CONNEXES                                                         

 

 

➳ Nos articles liés à la pratique de l'écriture

 

 

RÉDACTION #6 : LE PERFECTIONNISME
Tags : Améliorer sa plume, Rédaction, Clow
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#Posté le dimanche 13 octobre 2019 06:00

Modifié le samedi 13 mars 2021 08:04

RÉDACTION #9 : COMMENT CONSTRUIRE UN DIALOGUE ?

 
RÉDACTION #9 : COMMENT CONSTRUIRE UN DIALOGUE ?Vaste question s'il en est, la construction des dialogues représente souvent un arrachage de cheveux considérable pour tout·e auteur·ice qui souhaite agrémenter son récit de quelques épices. Parce que oui, le dialogue est au récit ce que le piment est à la sauce salsa (j'espère que vous avez le goût des métaphores et de la sauce salsa, CALIENTE). Il relève la narration, il réveille læ lecteur·ice, participe à læ tenir en haleine en jouant sur le rythme de l'intrigue et sur quelques révélations. Bref, le dialogue est l'allié indispensable du décollage de votre récit et de l'attachement à vos petits bonhommes. Pour le construire et qu'il acquiert ce statut de « bon dialogue », s'il existe quelques règles basiques, reste que, pour l'essentiel, il doit beaucoup à votre ressenti et votre spontanéité. Droit devant !


I – MISER SUR L'AUTHENTICITÉ EN S'INSPIRANT DU RÉEL : DONNER UNE VOIX




RÉDACTION #9 : COMMENT CONSTRUIRE UN DIALOGUE ?Avant toute chose, un dialogue est une interaction, c'est-à-dire qu'il engage plusieurs personnages et induit une correspondance et une cohérence entre ce que ces personnages se disent. Cela implique que les répliques des un·e·s répondent à celles des autres. Eh oui, comme dans la vie de tous les jours, sauf raison particulière, il ne vous viendrait pas à l'esprit de répondre à votre interlocuteur·ice en étant à côté de la plaque... Ce doit être la même chose dans votre récit, d'autant plus pour ne pas perdre votre lecteur·ice.

RÉDACTION #9 : COMMENT CONSTRUIRE UN DIALOGUE ?La construction de cet échange et de ces répliques dépend directement des attitudes et du caractère que vous aurez attribués à chacun de vos petits bonhommes, mais aussi de la relation qu'ils entretiennent. Concrètement, il est important que vous donniez à chacun·e de vos personnages une voix propre. Qui dit voix ne dit pas uniquement « ensemble de sons produits par les cordes vocales » (dont vous avez un aperçu ici), mais dit aussi “manière de s'exprimer et de s'impliquer dans une conversation” : chichis, vocabulaire, émotions, langage corporel, accent, âge ou encore classe sociale et milieu social, histoire, vécu et culture sont autant de facteurs qui entrent en compte dans n'importe quelle prise de parole (Elizabeth George est très attentive à cela dans la construction de ses personnages, je vous renvoie à l'analyse de son ouvrage). Le rythme des phrases en dit beaucoup, lui aussi, de l'élan de vos personnages, et instaure une spontanéité et une sincérité particulières dans leur manière de réagir. Ainsi, vos personnages peuvent être taciturnes et aimer le silence ou au contraire lâcher 500 mots à la minute ; ils peuvent faire les cent pas, hocher la tête, subir la conversation parce qu'ils n'apprécient pas la personne qui les alpague, toujours vouloir avoir raison, parler de façon monosyllabique, s'exprimer avec des mots compliqués pour paraître savants, répondre avec verve ou encore bredouiller pour toutes sortes de raisons...

RÉDACTION #9 : COMMENT CONSTRUIRE UN DIALOGUE ?Le dialogue, tout comme il dépend de leur caractère et de leur personnalité, est aussi une manière de les caractériser et de donner des informations sur leur tempérament ou sur leur vision du monde sans passer par la narration (avouez que c'est quand même utile). Ainsi, deux personnages ne devraient pas avoir les mêmes arguments, ni la même manière de les formuler, ni même employer les mêmes expressions (parce que oui, nous avons tous·tes nos expressions favorites). Une même information n'est pas relatée de la même manière par deux personnages puisqu'elle est empreinte de leur propre point de vue. Mais attention : le travers serait de tomber dans la caricature... Comme tout aspect à travailler pour construire son histoire, tout est dans le dosage et l'équilibre.

RÉDACTION #9 : COMMENT CONSTRUIRE UN DIALOGUE ?Donner une façon unique de parler à vos personnages, c'est non seulement les différencier les uns des autres, mais aussi les rendre plus authentiques, plus réels et leur donner plus de points d'attache avec vos lecteur·ice·s. Dans l'idéal, vos lecteur·ice·s devraient d'ailleurs savoir repérer vos êtres d'encre et de couleurs par leur façon de parler sans avoir à le préciser dans les incises de dialogue.

RÉDACTION #9 : COMMENT CONSTRUIRE UN DIALOGUE ?Et quoi de mieux pour vous aider à leur donner cette voix unique que d'analyser les conversations dans la vie courante ? Écoutez les gens parler autour de vous, écoutez leur spontanéité, notez quelques extraits de discussion, leur façon de s'exprimer, de se tenir ou les sujets mentionnés. Vous aurez de quoi vous inspirer pour transcrire ensuite vos dialogues sur papier.


II – DONNER DU SENS : ÊTRE UTILE À L'HISTOIRE                                         




RÉDACTION #9 : COMMENT CONSTRUIRE UN DIALOGUE ?S'inspirer du réel, c'est bien, mais donner un sens à son dialogue et justifier sa présence dans le récit est tout aussi nécessaire, car il ne doit pas être gratuit. Exit les « Oh, bonjour, ça va ? – Ça va et toi ? – Oui, super ! » dont l'utilité est proche de... zéro. Privilégiez les dialogues qui apportent quelque chose à l'histoire.

RÉDACTION #9 : COMMENT CONSTRUIRE UN DIALOGUE ?Nous venons de l'évoquer, le dialogue peut servir à caractériser des personnages en offrant des informations sur leur personnalité ou sur la nature de la relation qu'ils entretiennent avec leurs comparses, et ce, l'air de rien, via le principe du sacro-saint « show, don't tell ». De manière plus générale, le dialogue peut donner et mettre en relief des indications sur l'intrigue, servir de déclic ou de basculement en distillant des informations importantes qui tendraient à se perdre si elles passaient par la narration ; par exemple des indices dans le cadre d'une (en)quête ou une révélation. Enfin, il s'agit d'un bon outil pour faire varier le rythme du récit, pour le ralentir ou l'accélérer, surtout lorsqu'il vient trancher un passage particulièrement descriptif. Le dialogue peut être conçu comme une parenthèse pour læ lecteur·ice, comme un moment plus reposant au cours duquel iel pourra souffler, mais qui, à la fois, permettra de relancer le récit ou de clore un chapitre en installant une certaine tension. Il est aussi et surtout un moyen de rendre le récit plus vivant en rendant une scène plus visuelle.


III – LE LANGAGE PARLÉ, OUI, MAIS JUSQU'À UN CERTAIN POINT        




RÉDACTION #9 : COMMENT CONSTRUIRE UN DIALOGUE ?Écouter les conversations courantes, les paroles que s'échangent des ami·e·s dans la rue ou n'importe quelle autre conversation, c'est entendre un langage parfois très marqué par un accent, des abréviations ou des prononciations approximatives. Les conversations courantes sont truffées d'expressions comme « genre », « tu vois », « en fait », « quoi » ou « euh ». Parfois les mots sont mâchés, les phrases ne sont pas finies, on passe du coq à l'âne... L'erreur serait de vouloir à tout prix coller à ce schéma en en faisant une transcription littéraire. Le risque serait alors de perdre en compréhension de la scène avec des expressions et des redondances qui passent pour superflues à l'écrit, ou de verser dans la caricature. À titre d'exemple, si vous attribuez un accent trop prononcé à l'un de vos petits bonhomme, cela peut vite devenir agaçant ou créer un stéréotype insultant à l'égard des personnes qui utilisent ce dialecte dans la vie de tous les jours. L'idéal serait donc plutôt de manier ce langage parlé avec subtilité. En somme : un peu, mais pas partout et pas tout le temps. N'hésitez pas à consulter l'article de Nao sur les accents parlés.


IV – ANCRER LE DIALOGUE DANS UN CONTEXTE PRÉCIS                           




RÉDACTION #9 : COMMENT CONSTRUIRE UN DIALOGUE ?Outre la voix propre du personnage, le dialogue dépend du contexte dans lequel il se déroule, contexte qui influence la réaction de vos petits bonhommes et permet à la conversation de ne pas être figée dans l'espace, ni dans le temps. C'est pour cette raison que la narration avant dialogue, mais aussi inter-dialogue, est importante puisqu'elle apporte des informations sur la situation dans laquelle la discussion intervient, en permettant de jouer avec l'environnement – pensez au mouvement, faites bouger vos petits bonhommes ! Eh non, il ne doit pas y avoir la conversation, et juste la conversation !

RÉDACTION #9 : COMMENT CONSTRUIRE UN DIALOGUE ?Pourquoi la discussion paraît-elle tendue entre vos petits bonhommes ? Pourquoi l'un élude les questions de l'autre ? Pourquoi X est en colère ? Pourquoi cette gêne ambiante ? Vous ne pouvez espérer que læ lecteur·ice sache ce qui procure cette gêne pour votre personnage ou cette tension entre lui et Y si vous n'avez pas apporté quelques informations sur son vécu et ses relations avant ledit dialogue.

RÉDACTION #9 : COMMENT CONSTRUIRE UN DIALOGUE ?Si vous avez bien travaillé l'articulation des scènes au préalable, le contexte aura déjà été posé et vous permettra de faire l'économie de quelques détails qui risqueraient de faire de votre dialogue une scène d'exposition.


V – LIMITER LES DÉTAILS : ALLER À L'ESSENTIEL                                         




RÉDACTION #9 : COMMENT CONSTRUIRE UN DIALOGUE ?Pour éviter de donner trop de détails, partez toujours du principe que des personnages qui discutent d'un sujet ont une connaissance préalable de celui-ci ; ils savent des choses et il convient de le prendre en compte. Il est ainsi inutile de rappeler tous les tenants et les aboutissants de la conversation ; imaginez si dans la vie de tous les jours vous expliquiez le contexte de la discussion à vos interlocuteur·ice·s, cela n'aurait aucun sens ! Appuyez-vous sur des éléments subliminaux ou sous-entendus pour rappeler certaines précisions que vous avez pu faire lorsque vous avez planté le décor de la scène ou de l'intrigue. Gardez à l'esprit que le dialogue apporte du piment à votre récit. N'écrivez pas des pages et des pages de discussions, à moins que ça ne se justifie. L'idée est de garder læ lecteur·ice éveillé·e et pris·e dans l'histoire. Des dialogues trop longs peuvent entraîner un décrochage et une perte d'intérêt, de même quand leur construction est souvent similaire. Ajoutez d'autres épices, commencez-les en usant de nouveaux procédés : soyez un peu abrupt·e, posez une question que læ lecteur·ice n'a pas vue venir, introduisez avec une révélation, bref, surprenez-læ ! Effet garanti !


VI – LES VERBES D'INCISE, DIT-ELLE ? ÉVITER LA LOURDEUR                




RÉDACTION #9 : COMMENT CONSTRUIRE UN DIALOGUE ?Quoi de plus lourd et de plus rageant que les « dit-iel » à la pelle et à la truelle pour chaque réplique ? Utilisez les incises avec intelligence et parcimonie ; cela sera d'autant plus facile que vous aurez doté vos petits bonhommes d'une voix propre et distincte qui les rendra reconnaissables entre mille ! Les incises ne sont pas toujours très utiles. Surtout, elles sont utilisées la plupart du temps pour expliciter une émotion. Dans ce cas, rien de tel que le fameux « show, don't tell » pour évoquer le ressenti de vos petits bonhommes. Privilégiez la traduction de l'émotion en filigrane de la réplique et en complément de la narration et du langage corporel. L'incise ne peut se suffire à elle-même.

RÉDACTION #9 : COMMENT CONSTRUIRE UN DIALOGUE ?A contrario, les incises deviennent nécessaires lorsque plus de deux personnages sont en interaction. Même si elles utilisent des verbes ternes, elles ont l'intérêt de préciser qui s'exprime et d'éviter la confusion. À noter qu'il existe une multitude de verbes qui permettent de nuancer l'expression et de limiter l'usage des « dit-iel » : insinuer, expliciter, argumenter, affirmer, s'exclamer, expliquer, annoncer, demander, indiquer, faire observer, faire valoir, répliquer, assurer, concéder, espérer, raconter, souligner, s'énerver, se révolter, s'indigner, etc. Les possibilités sont nombreuses et il existera toujours un terme pour traduire votre idée au mieux.

RÉDACTION #9 : COMMENT CONSTRUIRE UN DIALOGUE ?Dans la même idée, évitez de toujours répéter les noms des personnages dans les répliques. Ce n'est pas très naturel, à moins que votre héros ou votre héroïne ait un penchant particulier pour préciser le nom du petit bonhomme auquel iel parle... Ça existe (et c'est particulièrement agaçant dans la vie de tous les jours ARG), mais mieux vaut ne pas pousser le bouchon, Maurice !


VII – CONCLUSION                                                                                                           




RÉDACTION #9 : COMMENT CONSTRUIRE UN DIALOGUE ?Ces quelques clés devraient vous permettre d'écrire des dialogues du feu de Dieu ! En réalité, il n'existe pas tant de secrets que ça pour maîtriser l'exercice, le plus important est encore de faire appel à son ressenti et de se faire confiance. Eh oui, nous avons trop souvent tendance à nous mettre la pression lorsque vient le moment d'écrire une interaction entre nos petits bonhommes, mais pas de panique ! Posez-vous juste les bonnes questions. Le dialogue est-il utile à votre histoire ? Apporte-t-il un éclairage sur l'intrigue et ce qui se joue entre les personnages ? Est-il suffisamment entraînant ? Permet-il de mettre en avant un ressenti, une émotion ? Que dit-il de la situation ? N'oubliez pas qu'en matière d'écriture, il est aussi important de faire preuve de lâcher prise et de ne pas trop s'arracher les cheveux. Dans les dialogues, il est nécessaire de conserver un peu de spontanéité et de ne pas trop réfléchir à la formulation des répliques en amont (à moins d'écrire dans un genre littéraire qui demande un minimum de travail à ce niveau-là, par exemple dans le cas d'une histoire qui se déroulerait durant des temps immémoriaux). Cela permet de gagner en naturel et en réalisme, de raccrocher votre lecteur·ice à son propre vécu et de mieux læ prendre dans vos filets ! Si, après cet article, vous ne savez toujours pas comment faire, ou si vous avez besoin d'illustration, lisez, inspirez-vous de ce que font les auteur·ices qui vous entourent, de leur manière de construire une discussion entre leurs personnages ! Et n'hésitez jamais à échanger sur le sujet avec vos comparses ! Un avis extérieur est toujours bienvenu.

RÉDACTION #9 : COMMENT CONSTRUIRE UN DIALOGUE ?Enfin, ne négligez jamais la typographie, ni la ponctuation ! Maîtriser l'art des guillemets et des tirets cadratins (entre autres) vous permettra de ne pas passer pour un·e amateur·ice et vous fera tout de suite gagner en crédibilité ! Oui, souvent, le visuel contribue à forger une idée stéréotypée de ce que l'on peut potentiellement lire... Pour pallier ce problème, Eva vous a concocté il y a quelques mois, un super article ici, qui revient sur les différentes règles de mise en forme des dialogues. Si avec tout ça vous n'êtes pas paré·e·s...

RÉDACTION #9 : COMMENT CONSTRUIRE UN DIALOGUE ?Presque ! Dernière astuce et non des moindres pour savoir si votre dialogue fait le job : le lire à voix haute avec tout ce que vous avez de passion pour le théâtre ! (oui oui, c'est important, donnez tout ce que vous avez). Cela vous sera d'une grande aide pour analyser la répartition du temps de parole, repérer et traquer les lourdeurs, mais aussi identifier les caractéristiques d'expression que vous aurez ou non attribuées à vos petits bonhommes.

RÉDACTION #9 : COMMENT CONSTRUIRE UN DIALOGUE ?Allez, au boulot ! Zou !


VIII – RESSOURCES ET ARTICLES CONNEXES                                                    


➳ Toutes les nuances de la voix
➳ Les conseils d'Elizabeth George dans l'écriture
➳ Transcrire les accents parlés dans un récit
➳ Les verbes ternes
➳ La liste des verbes d'incise
➳ La typographie des dialogues

RÉDACTION #9 : COMMENT CONSTRUIRE UN DIALOGUE ?
Tags : Améliorer sa plume, Rédaction, Clow
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